Sortie livreLe roman total d’un arpent de terre américain
«Seule restait la forêt» déroule des récits de vie qui traversent le temps sur un même lieu sauvage du Massachusetts, cousus par la belle plume de l’auteur américain Daniel Mason et sa traductrice.
Ce livre est un enchantement, une partition symphonique, des récits cousus sur une trame du temps long, celui d’une nature vivante, rendue par une écriture pleine de douce sensualité. Car «Seule restait la forêt» raconte l’histoire de ceux qui ont vécu sur ce même arpent de terre du Massachusetts dans la vallée d’Oakfield, la terre du lion des montagnes.
C’est un roman américain, d’un peuple des grands espaces, pour qui «Les oiseaux d’Amérique», du peintre et naturaliste Jean-Jacques Audubon, est le livre identitaire aux côtés de la Bible. «Seule restait la forêt» («North Woods», «Les bois du nord», titre original) de Daniel Mason est aussi le livre des pionniers, de l’esclavage et des abolitionnistes, du spiritisme, du 4e amendement, d’une société violente et corsetée.
Des vies attachées à un lieu
L’histoire commence avec celle d’un couple, les Osgood, qui construisent une maison dans les bois, s’installent loin de tout pour échapper à rigueur d’une congrégation puritaine, d’un soldat qui quitte les armes pour créer un verger, de la «Merveille d’Osgood», une pomme exceptionnelle, de leurs deux filles en rivalité, d’un amour caché entre un peintre et un écrivain, d’une histoire de coléoptère, d’une mère et de son fils schizophrène, d’une enquête pour meurtre, d’un refuge en pleine forêt. Autant de vies attachées à ce lieu.
D’une belle écriture, Daniel Mason enchaîne ces histoires d’hommes, presque des nouvelles, liées entre elles, des récits suivis ou par lettres, des poèmes et des traces laissées par une humanité de passage, d’une nature très présente et très bien rendue, qui change mais reste puissante et mystérieuse, d’une maison qu’on retape ou tombe en ruine. C’est ainsi que l’on est entraîné dans cette fresque naturaliste et temporelle d’une Amérique sauvage suscitant un grand plaisir de lecture.
«Seule restait la forêt» de Daniel Mason, traduit de l’anglais par Claire-Marie Clévy, Éd. Buchet Chastel, 512 p., août 2024, de 34 fr. 05 à 37 fr. 80.
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