Aller au contenu

Vol LaMia 2933

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Vol LaMia 2933
L'Avro 146-RJ 85 impliqué dans l'accident, ici avec son ancienne immatriculation (P4-LOR), photographié en octobre 2013.
L'Avro 146-RJ 85 impliqué dans l'accident, ici avec son ancienne immatriculation (P4-LOR), photographié en octobre 2013.
Caractéristiques de l'accident
Date
TypePanne de carburant en vol
CausesMauvaise préparation et gestion du vol, équipage mal formé aux situations d'urgence conduisant à de multiples erreurs de pilotage
SiteCerro Gordo, dans la commune de La Unión, en Colombie.
Coordonnées 5° 58′ 43″ nord, 75° 25′ 06″ ouest
Caractéristiques de l'appareil
Type d'appareilAvro 146-RJ 85
CompagnieLaMia
No  d'identificationCP-2933
Lieu d'origineAéroport international de Viru Viru, Santa Cruz de la Sierra, Bolivie
Lieu de destinationAéroport international José-María-Córdova, Medellín, Colombie
PhaseCroisière
Passagers68
Équipage9
Morts71 (dont un décédé à l’hôpital)
Blessés6
Survivants6

Géolocalisation sur la carte : Colombie
(Voir situation sur carte : Colombie)
Vol LaMia 2933

Le , l'Avro 146-RJ 85 du vol LaMia 2933, transportant l'équipe de football brésilienne de Chapecoense entre Santa Cruz de la Sierra (en Bolivie) et Medellín (en Colombie), s'écrase sur une colline, à court de carburant, avec 77 personnes à son bord, dont seules 6 survivent au crash. Le club s'apprêtait à disputer à Medellín le match aller de la finale de la Copa Sudamericana 2016 face à l'Atlético Nacional.

Avion et équipage

[modifier | modifier le code]
L'appareil impliqué dans l'accident, sous son ancienne immatriculation (N523XJ), alors exploité par Mesaba Airlines, pour le compte de Northwest Airlink

L'avion est un Avro 146-RJ 85 de la compagnie LaMia[1]. Selon un porte-parole du constructeur BAE Systems, l'avion a été mis en service en 1999[2]. Il a été acheté en 2013 par LaMia, l'avion ayant préalablement servi à deux autres compagnies aériennes[2] : Mesaba Airlines (1999-2007) et CityJet (2007-2013)[3].

Le vol 2933 était initialement programmé sur un Airbus A320, directement depuis São Paulo jusqu'à Medellín, mais ce dernier, immatriculé en Bolivie, n'a pas reçu l'accord de l'aviation civile colombienne, les accords internationaux exigeant que l'avion soit immatriculé dans le pays de départ ou d'arrivée[4].

Le commandant de bord était Miguel Alejandro Quiroga Murakami (36 ans), ancien pilote de la Force aérienne bolivienne (FAB), et qui avait auparavant volé pour EcoJet (en), qui exploitait également des Avro 146-RJ 85. Il a ensuite rejoint LaMia en 2013 et, au moment de l'accident, il était l'un des copropriétaires de la compagnie aérienne, ainsi qu'instructeur de vol. Au moment de l'accident, il avait cumulé 6 692 heures de vol, dont 3 417 heures sur Avro 146.

Le copilote était Fernando Goytia (47 ans), qui était également un ancien pilote de la Force aérienne bolivienne. Il a obtenu sa qualification sur ce type d'avion cinq mois avant l'accident, et totalisait 6 923 heures de vol, dont 1 474 heures sur Avro 146.

Sisy Arias (29 ans), pilote en formation, était dans le cockpit en tant qu'observatrice. Elle avait été interviewée par la télévision bolivienne peu avant le vol.

Déroulement de l'accident

[modifier | modifier le code]
Vol en boucle au cours des quinze dernières minutes. L'étoile orange indique l'emplacement où les signaux ADS-B ont été perdus. Une explosion rouge indique le site de l'accident.

Le pilote signale être à court de carburant et d'électricité alors qu'il se trouve à 8,2 nautiques de la piste (15,2 km). Le contrôle au sol lui demande alors de monter au-dessus des 10 000 pieds nécessaires pour passer au-dessus du Cerro Gordo (Gros pic) avant d'amorcer une descente en urgence sans instrument.

Puis l'avion s'écrase sur Cerro Gordo, une colline située à cinq minutes de la piste de l'aéroport international José-María-Córdova à une altitude de 3 300 m. L'arrière de l'avion a heurté le sol en premier, de sorte que la queue était au sommet de la montagne tandis que le fuselage et le cockpit étaient plus bas.

D'après une hôtesse de l'air rescapée, l'avion souffrait de problèmes électriques, mais il est tombé en panne de carburant aviation, cet avion n'étant pas certifié pour des vols sur cette distance. La distance entre les deux aéroports est de 2 972 km, soit 10 km de plus que l'autonomie maximale de l'Avro RJ85, de 2 962 km, et 272 km de plus que la distance pour laquelle il est certifié (2 700 km). De plus, la situation complexe à l'approche de Medellín et au-dessus du Cerro Gordo a obligé le contrôle à mettre des avions en attente. Le vol 2933 a alors demandé un atterrissage prioritaire, alors que le vol 8170 de VivaColombia avait également demandé un atterrissage d'urgence[5]. L'enquête confirme en qu'il manquait 2,3 tonnes de carburant pour assurer en toute sécurité cette liaison[6].

Outre le problème de distance, de nombreuses erreurs dans la préparation du vol ont été détectées. Le vol avait déclaré une escale à Cobija (Bolivie) afin de refaire le plein de carburant mais il ne s'y est pas posé, sans que l'on sache pourquoi. Par ailleurs le pilote — et directeur de la compagnie aérienne — tarde à admettre la gravité de la situation, ce qui retarde son atterrissage en urgence de neuf minutes, temps pendant lequel il a parcouru deux boucles d'attente d'environ trente kilomètres, alors qu'il ne se trouvait qu'à quinze kilomètres de la piste[7].

L'avion s'est écrasé en haute montagne, dans un lieu difficile d'accès. Un des survivants, Erwin Tumiri, raconte que pendant la chute finale de l'avion, beaucoup de passagers paniqués se sont levés de leur siège en pleurant et en criant. Lui-même se met en position de sécurité et cale ses jambes avec une valise, ce qui lui sauve probablement la vie[8]. L'absence de recommandations de sécurité de la part de la compagnie aérienne a d'ailleurs été dénoncée par un autre survivant : « «On nous a dit qu’il restait seulement dix minutes de vol. Puis, soudainement, les lumières se sont éteintes et les moteurs se sont arrêtés. Il y a eu une certaine appréhension, mais personne ne pouvait imaginer qu’on allait s’écraser. Personne ne nous a jamais dit de mettre nos ceintures de sécurité. Personne n’a rien dit et nous ignorions ce qui allait arriver. Même si j’ai vu de la détresse chez les deux membres d’équipage qui étaient derrière moi. Mais il n’y a pas eu de cris» »[9].

Opérations de recherche

[modifier | modifier le code]

Bilan humain

[modifier | modifier le code]

L'avion transportait 77 personnes à son bord : 68 passagers et neuf membres d'équipage. Six survivants ont été retrouvés[10].

Alors que le bilan officiel est initialement de 75 morts, les autorités revoient ce chiffre à la baisse le lendemain et font état de 71 morts. En effet, quatre personnes figurant sur la liste des passagers n'étaient finalement pas montées à bord[2].

L'équipe de Chapecoense devait jouer le match aller de la finale de la Copa Sudamericana 2016 contre le club de l'Atlético Nacional[11]. Parmi les passagers se trouvaient également de nombreux journalistes.

Sept passagers ont survécu au crash, mais Marcos Danilo Padilha est mort lors du transport à l'hôpital[12]. Parmi ceux-ci figurent trois joueurs de Chapecoense : le défenseur de 27 ans Alan Ruschel, Jakson Follmann (amputé de la jambe droite) et Neto. Les trois autres survivants sont un journaliste, Rafael Valmorbida, et deux membres de l'équipage, Ximena Suarez et Erwin Tumiri[13]. Le technicien Erwin Tumiri, sorti indemne, a pu témoigner le premier sur l’accident. Il doit sa survie non pas à la chance mais au fait qu'il a eu la présence d'esprit de se mettre en position de sécurité, alors que dans la panique la plupart étaient debout et criaient[14]. Un rescapé est gravement blessé à la colonne vertébrale et pourrait rester paraplégique tandis qu'un autre a dû être opéré. Le journaliste brésilien Ivan Agnoletto avait laissé sa place à un autre journaliste et ami de longue date qui n'a pas survécu.

Nationalité Passagers Équipage Total
Drapeau du Brésil Brésil 52
Drapeau de la Bolivie Bolivie 5
Drapeau du Paraguay Paraguay 1
Drapeau du Venezuela Venezuela 1
Non identifiés 18
Total 68 9 77

Personnalités tuées

[modifier | modifier le code]

Footballeurs de l'équipe de Chapecoense :

Autres :

Personnalités rescapées

[modifier | modifier le code]
  • Follman (joueur)
  • Neto (joueur)
  • Ruschel (joueur)
  • Rafael Valmorbida (journaliste)
  • Erwin Tumiri (membre d'équipage)
  • Ximena Suarez (membre d'équipage)

Conséquences

[modifier | modifier le code]
Drapeau en berne

Le jour même, les autorités brésiliennes annoncent un deuil national de trois jours. Michel Temer, président du Brésil, déclare : « Je veux exprimer ma solidarité en ce triste moment où la tragédie déchire des dizaines de familles brésiliennes. Le gouvernement fera tout ce qu'il peut pour soulager la douleur des amis et de la famille du sport et du journalisme[15] ».

À la suite du crash, la finale de la Copa Sudamericana 2016, prévue pour le (match aller) et le (match retour), est reportée à une date indéterminée[16]. L'adversaire de la finale, l'Atlético Nacional, demande même à la Confédération sud-américaine de football d'attribuer le titre à l'équipe de Chapecoense, en hommage aux membres de l'équipe, disparus[17]. La Confédération accepte le et décerne le titre à Chapecoense, et remet à l'Atlético Nacional le prix « Centenaire Conmebol au fair-play », doté d'une récompense d'un million de dollars américains[18].

La ligne rouge correspond au vol réel et la bleue au vol programmé

Le , la justice colombienne annonce avoir arrêté Gustavo Vargas, directeur général de LaMia et deux employés et vouloir les interroger pour des charges de négligence criminelle. Le procureur général n'exclut pas que les charges pourraient être requalifiées en homicide volontaire. Six personnes sont interrogées par la justice dans le cadre de l'affaire, dont la contrôleuse aérienne. Celle-ci explique avoir demandé une modification du plan de vol pour y insérer un arrêt ravitaillement, mais que sa demande aurait été refusée[19].

Selon des déclarations de l'avocat du copilote à une agence de presse le pilote n'aurait pas eu à son actif le nombre requis d'heures de vol pour être autorisé à prendre les commandes de l'avion. Le ministre colombien de la défense explique pour sa part que c'est pour des raisons d'économie que le pilote aurait renoncé à faire une escale intermédiaire pour se ravitailler en carburant[20].

Pour des raisons inconnues, le CVR (Cockpit Voice Recorder) a cessé d'enregistrer une heure et quarante minutes avant le FDR (Flight Data Recorder), alors que l'avion se trouvait encore à environ 550 nm (1 020 km) du lieu de l'accident. Selon certains spécialistes, l'équipage aurait délibérément déconnecté l'enregistreur de vol. Cependant, selon le rapport final de l'enquête, cette théorie apparaît comme « très improbable » alors que les enquêteurs indiquent qu'il s'agirait plutôt d'une défaillance mécanique inconnue qui aurait amené l'enregistreur à s'arrêter brutalement. De plus, dans le rapport final, les enquêteurs indiquent : « il convient de noter que, selon les critères techniques caractéristiques du fonctionnement de l’équipement [de l'avion], il n’est pas possible d’effacer le CVR en [plein] vol »[21].

Échanges entre l'avion et le contrôle

[modifier | modifier le code]

Les derniers échanges sont les suivants[22] :

«  Pilote : Mademoiselle, LaMia 933 est en perdition totale, arrêt électrique total, sans carburant.
Tour de contrôle : La piste est libre ; nous attendons de la pluie, LaMia 933. Les pompiers sont alertés.
Pilotes : Vecteurs, mademoiselle, vecteurs vers la piste.
Tour de contrôle : Le contact radar est perdu, je ne l'ai pas, indiquez-moi votre route.
Pilote 933 : Nous sommes sur une route 3-6-0, route 3-6-0.
Tour de contrôle : Virez à gauche 0-1-0 et lancez la localisation du VOR [...] Rionegro à 1 NM avant El Bora [village] je confirme par la gauche route au 3-5-0
Pilote 933 : À gauche 3-5-0 mademoiselle
Tour de contrôle : Oui, correct, vous êtes à 0,1 NM du VOR de Rionegro
Tour de contrôle : Je n'ai pas l'altitude LaMia 933
Pilote : 9 000 pieds mademoiselle
Pilote : Vecteurs, vecteurs
Tour de contrôle : Vous êtes à 8,2 NM de la piste
Tour de contrôle : Quelle est votre altitude maintenant ?
Tour de contrôle : LaMia 933, position ?  »

L'accident a fait l'objet d'un épisode dans la série télévisée Air Crash nommé « Tragédie footballistique » (saison 19 - épisode 9).

Notes et références

[modifier | modifier le code]
  1. AFP, « Un avion transportant l'équipe brésilienne de football Chapecoense s'est écrasé en Colombie » sur Le Huffington Post, 29 novembre 2016.
  2. a b et c « Crash d'un avion en Colombie : ce que l'on sait », Ouest-France,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  3. https://www.planespotters.net/airframe/British-Aerospace/BAe-146/E2348/CP-2933-LAMIA-Bolivia « Copie archivée » (version du sur Internet Archive)
  4. (es) « Chapecoense iba a tomar un vuelo directo pero no pudo por acuerdos internacionales », El Universo,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  5. (en) Richter Jan, « 2016-11-28 LAMIA Avro RJ-85 crashed near Medellin with 81 on board », JACDEC,
  6. « Vidéo - Crash de LaMia en Colombie : la panne sèche confirmée », sur www.aeronewstv.com, (consulté le ).
  7. (es) « Análisis revela cinco fallas del piloto de LaMia en su diálogo con la torre de control », El Universo,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  8. « Crash de Chapecoense: Le technicien Erwin Tumiri raconte comment il a fait pour survivre à l'accident d'avion » sur le huffingtonpost.fr, 30 novembre 2016.
  9. « Crash de Chapecoense : "Le pire a été de voir que mes amis étaient morts" », sur parismatch.com, (consulté le )
  10. LeMonde.fr avec AFP et AP, « Un avion transportant une équipe de football brésilienne s’est écrasé en Colombie » sur Le Monde, 23 novembre 2016.
  11. « L’équipe de Chapecoense au cœur du drame aérien en Colombie - Etranger - Football », Sport24,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  12. L'Equipe.fr avec AFP, « Des survivants dans l'accident d'avion transportant l'équipe brésilienne de Chapecoense », L'Equipe.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  13. « Crash aérien : la liste des rescapés connue - Foot - Crash aérien », sur lequipe.fr, L'Équipe, (consulté le ).
  14. Crash en Colombie : six survivants, Le Monde, 30 novembre 2016.
  15. Crash aérien : Un deuil national a été décrété au Brésil sur L'Équipe, 29 novembre 2016.
  16. La finale retour de la Coupe du Brésil reportée après l'accident d'avion sur L'Équipe, 29 novembre 2016.
  17. Drame : L'Atletico Nacional demande l'attribution du titre à Chapecoense sur foot01.com, 29 novembre 2016
  18. (es) « CONMEBOL otorga el título de Campeón de la Sudamericana 2016 a Chapecoense y reconoce a Atlético Nacional con el premio del Centenario de la Conmebol al Fair Play », sur www.conmebol.com, (consulté le ).
  19. Crash aérien en Colombie: arrestation du directeur et de 2 employés de la compagnie Lamia, La Libre Belgique, 7 décembre 2016
  20. Crash aérien en Colombie: "Le pilote n'avait pas suffisamment d'heures de vol au compteur", La Libre Belgique, 19 décembre 2016
  21. (en) « Final Report - LaMia Airlines Flight 2933 », sur reports.aviation-safety.net,
  22. (es) « Así fue la conversación entre el avión del Chapecoense y la torre de control » sur eluniverso.com, 30 novembre 2016.

Articles connexes

[modifier | modifier le code]

Liens externes

[modifier | modifier le code]