Louis Godefroy

militant communiste français

Louis Godefroy, alias Marcel, alias Robert, alias Auriac, alias Rivière, né le à Barbaste (Lot-et-Garonne), mort le à Saint-Jean-de-Fos (Hérault), est un militant communiste, connu pour ses faits de résistance durant la Seconde Guerre mondiale.

Membre des Francs-tireurs et partisans français (FTPF), il commande l’interrégion G. Puis membre des Forces françaises de l'intérieur (FFI), il embrasse la carrière militaire en 1944 et est notamment commandant d'un régiment de la première Armée qui participe à la libération de l’Alsace. Il est Compagnon de la Libération par décret du 17 novembre 1945.

Biographie

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Louis Godefroy est né le , dans la commune de Barbaste (Lot-et-Garonne). Son père exerce la profession de mécanicien et sa mère travaille dans une fabrique de bouchon.

À l’issue de ses études secondaires, il embrasse la profession de plombier-zingueur, puis, à la veille de ses 20 ans, en , il s’engage au 14e régiment d'infanterie, basé à Toulouse. Il y sert pendant 18 mois, avant de reprendre son activité d’ouvrier du bâtiment.

Il s’engage alors en politique, au sein du Parti communiste, et exerce des responsabilités en Lot-et-Garonne et en Ariège.

En 1936, lors de la guerre civile espagnole, il s’engage dans les Brigades internationales et prend part, notamment, à la tête d’une compagnie, à la Bataille de l'Èbre.

À l’occasion de la Seconde Guerre mondiale, il est mobilisé dès , et promu caporal-chef en . Fait prisonnier le , il est interné à Metz. Il s’évade le , lors de son transfert en Allemagne.

Entrée en Résistance

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Louis Godefroy entre en Résistance à la suite de son évasion du , sous le pseudonyme Marcel. Il fait partie, dès 1941, des Français libres, c'est-à-dire des tout premiers Résistants qui rallient le général de Gaulle à la suite de son appel du [1].

Particulièrement actif, se consacrant à des actions de propagande et à l’organisation de groupements d’action directe, il devient l’un des dirigeants de l’Organisation spéciale (OS), structure clandestine du Parti communiste français, en zone Sud.

Arrêté à Narbonne, le par la police de Vichy, il est condamné à quinze ans de travaux forcés par la cour spéciale de Montpellier.

Emprisonné à Saint-Étienne, il s’évade en , avec trente et un autres résistants, responsables syndicaux et militants communistes[2].

Rejoignant alors la résistance dans la Loire, il prend la tête d’un groupe comme sous-lieutenant, groupe qui harcèle sans cesse l’ennemi.

Activités au sein des FTP

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Louis Godefroy intègre la branche armée de la Résistance communiste, les FTPF, mise en place par Charles Tillon et résultant de la fusion de l'OS (Organisation spéciale), des bataillons de la jeunesse (organisations de combat des Jeunesses communistes) et de la MOI (Main-d’œuvre immigrée)[3].

Il est nommé lieutenant par l'État-major des FTPF en et assure les responsabilités de ‘’commissaire aux opérations’’ de l’interrégion G, circonscription qui comprend les départements de l’Ardèche, de la Dordogne, du Gard et du Vaucluse.

Commandant toutes les actions militaires de cette interrégion, il exécute ou fait exécuter de multiples sabotages, ou attaques, dont celle d’un train de permissionnaires allemands à Portes-lès-Valence le [4], à Montélimar et aux environs de Nîmes, qui coûtent à l'ennemi plus de 300 hommes et la perte d'un matériel ferroviaire important.

En , nommé capitaine FTPF en , Louis Godefroy occupe le poste de chef technique de l'importante interrégion du Centre (Indre, Creuse, Haute-Vienne, Dordogne, Corrèze, Lot et territoires de l'ex-zone non occupée de la Vienne, de la Charente et de la Gironde).

Il y organise les parachutages, met en route des fabrications d'armes, de munitions et d'explosifs qui permettent de ravitailler les groupes d'action directe. Il organise en outre le renseignement, les transports, et le service sanitaire de son interrégion.

Le 1er bataillon FTPF, de Dordogne, est constitué. Au cours d'une réunion près de Milhac, Roger Ranoux, dit Hercule, en prend le commandement. En mai 1944, lors de deux réunions avec Marcel Godefroy, le département est divisé en trois sous secteurs :

  • Le A avec Roger Ranoux, Pierre Michaud dit Normand, Pierre Lanxade, qui sera remplacé à la mort de ce dernier en 1944 ;
  • Le B avec Waldeck, Louis Parouty ;
  • Le C avec Pierre Legendre dit Henri, Roger Faure, dit Jim.

L'organisation est attribué à Édouard Valéry, dit Lecoeur, Marcel Serre, dit Bernard, et Jean Garraud, dit Benjamin[5].

Le , Louis Godefroy est promu commandant et délégué militaire de son Etat-major. Il commande alors les opérations dans l' interrégion du Centre où il était précédemment chef technique.

Louis Godefroy participe à la mise sur pied de plans d'ensemble organisant des opérations sur Thiviers et Sarlande, en Dordogne; sur Vigeois et Donzenac en Corrèze; sur Châlus, en Haute-Vienne et à Aubusson dans la Creuse.

Début mai 1944, Louis Godefroy, informa Édouard Valéry, qu'il était muté en Dordogne, pour prendre un poste identique à celui en Corrèze, il sera commissaire aux opérations régional des FTPF[6].

La réalisation de ses plans d'opérations coûte à l'ennemi plus de 1500 tués ou blessés, la perte d'un matériel important (armes, camions, auto-blindées, etc.) et désorganise tous les transports ennemis (233 coupures de voie ferrée, 5 ouvrages d'art sur voie ferrée, 15 ponts sur route), de nombreux pylônes électriques (barrage de Marège de Bar), une usine électrique (La Tuilhère, en Dordogne) et de nombreux wagons et locomotives, ainsi qu'une grue sur voie. Sous sa direction, les FTPF mènent des opérations à Eymoutiers (Haute-Vienne), Egletons et Tulle (Corrèze), qu’il commande personnellement.

Du 8 au , il organise dans le Lot et la Corrèze, le harcèlement par les FTPF de la division SS Das Reich qui, attaquée également par d’autres unités FFI, subit un retard de plusieurs jours dans sa marche. Le nom division SS «Das Reich» reste indissolublement associé aux massacres commis en juin 1944 à Tulle, à Combeauvert, à Argenton-sur-Creuse et à Oradour-sur-Glane.

Après la bataille de Tulle, il donne l'ordre de fusiller 47 prisonniers allemands et une femme française accusée de collaboration[7]. Les exécutions ont lieu à Meymac le 12 juin 1944[7]. Louis Godefroy assume la responsabilité de l’ordre d’exécution dans un témoignage rédigé après la guerre et conservé aux archives de Tulle: « C’était outre une charge énorme un réel danger pour la sécurité de nos éléments d’avoir à garder des prisonniers alors que l’ennemi sillonnait la région. La situation (…) exigeait leur disparition immédiate »[7]. Il ajoute que les prisonniers connaissaient désormais les déplacements et les caches des maquisards, ce qui justifiait à ses yeux « de prendre la seule décision possible : les passer par les armes »[7].

Activités au sein des FFI

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Circonscriptions régionales mises en place par les FFI. Louis Godefroy est adjoint au commandant de la Région 5, dont le siège est Limoges

Les Forces françaises de l'intérieur (FFI) sont créées, théoriquement, fin décembre 1943 sous l’autorité politique du Général de Gaulle avec pour objectif est d’unifier, de donner un cadre légal, et de structurer de manière hiérarchique les multiples, diverses et éparses forces de Résistance intérieure.

Les FFI regroupent notamment l'Armée secrète (AS) (qui regroupe, elle-même, les réseaux Combat, Libération-Sud, Franc-Tireur), l'Organisation de résistance de l'armée (ORA) et les Francs-tireurs et partisans (FTP), dont fait partie Louis Godefroy. Elles sont placées, en mars 1944 sous le commandement du général Kœnig et l'autorité politique du GPRF, dirigé par le général de Gaulle.

Louis Godefroy, alias Rivière, est alors délégué interdépartemental des FTP, dont le siège de l’État-major est situé en Haute-Vienne à Châlus[N 1].

Le , Louis Godefroy, responsable régional des FTP, devient membre de l’État-major des Forces françaises de l’intérieur (FFI) de la Région R 5 (Limoges), dont le délégué militaire régional (DMR) est Eugène Déchelette.

Sous les ordres du commandant régional, le colonel Rousselier, Louis Godefroy est promu lieutenant-colonel le , puis colonel, le , après avoir été responsable de la Corrèze, département pour lequel il est remplacé par Roger Lecherbonnier (alias Antoine) [8], tandis que Georges Guingouin, le préfet du marquis, est chargé de la Haute-Vienne et Albert Fossey (alias François) de la Creuse et du Cher zone sud (R5/D2), zone dont il était chef départemental des FFI depuis .

Adjoint au commandant de la 12e Région militaire (Limoges), organisant et commandant les troupes de la 12e RM, Godefroy est chargé des opérations sur le nord-ouest, nord et nord-est. Dans l'Indre, il harcèle encore l'ennemi et l'oblige à se rendre. Dans la 12e RM, il met sur pied des unités dans des conditions matérielles extrêmement dures, alimentant ainsi la 1re Armée française et le Front de l'Atlantique.

Carrière militaire

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À la mi-, le colonel Godefroy rejoint la 1re armée, qui est placée sous le commandement du général de Lattre de Tassigny.

Le colonel Godefroy dirige le 126e régiment d'infanterie de ligne[9], succédant au commandant Passemard qui a reconstitué ce régiment en 1944 à Brive[10], essentiellement à partir de maquis de Corrèze et de Dordogne, regroupés autour de son drapeau préservé de l’occupant.

D'abord mis à la disposition de la 2e brigade de la 1re division française libre, le régiment commandé par Louis Godefroy participe à la libération de l’Alsace, renforce la 2e brigade à l’occasion de la défense de Strasbourg, et de la surveillance de la rive gauche du Rhin. Puis mis à disposition de la 2e division d'infanterie marocaine, ce régiment participe avec la 9e Division d'Infanterie Coloniale à la campagne en Allemagne, combat à Karlsruhe, Ruppur et Rastadt avec le 23e R.I.C et le 6e R.I.C.

Activités d’après-guerre

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Après la dissolution, le à l’issue de neuf mois d’occupation en Allemagne, du 126e régiment d’infanterie[N 2] dont il était le chef de corps, Louis Godefroy quitte l’armée.

Il travaille alors au secrétariat national de l’association nationale des anciens combattants de la Résistance.

Puis, de 1960 à 1967, Louis Godefroy œuvre dans l’édition.

Quelques mois avant son décès, en présence du commandant Passemard, son prédécesseur à la tête du régiment, il est reçu en salle d'honneur du 126e RI. Avant remettre un don, il précise des faits historiques suivants :

  • Il cite son altercation avec le général de Lattre de Tassigny qui dans ses ordres voulait faire franchir le Rhin au 126e RI sans préparation d'artillerie. Celle-ci obtenue de haute lutte, la mission fut brillamment exécutée ;
  • Il témoigne aussi du fait que le général ne lui en tint pas rigueur. En effet, pour marquer son estime à propos du 126e RI, il passa avec celui-ci sa dernière journée à la tête de la 1re armée.

À cette occasion il offre au régiment son fanion dédicacé[11].

Il décède le à Saint-Jean-de-Fos, où il est repose dans le caveau familial[12].

Alias et patronymes

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Lorsqu’il entre en Résistance, Louis Godefroy prend, pour pseudonyme, son second prénom d’État-civil : Marcel. Puis, il utilise, successivement, les alias Robert et Auriac. Cependant, le nom de Résistant sous lequel il apparaît le plus souvent est Rivière.

Le patronyme Godefroy

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Hommage rendu à un résistant homonyme (la plaque comporte une faute, les deux autres plaques au 11 rue des Envierges[13] et sur la passerelle de la Mare (Voir photo) portent la bonne orthographe).

Le mot Godefroy est d’origine germanique. Il a, pour signification étymologique, La paix de Dieu[14].

Nom de bâptème, devenu également patronyme ou nom de famille, il est relativement commun en France. Ainsi, il est porté, outre Louis Godefroy, par huit autres tout premiers Résistants, membres de la France libre, dont deux femmes[15].

Godefroy est également le patronyme d’un jeune résistant, Pierre Godefroy, commandant de compagnie, abattu avec trois camarades à Théorat[16], sur la commune de Neuvic sur l’Isle, le lors de la Libération de la Dordogne[17].

Godefroy est aussi le nom d’une famille de Lorraine, dont deux des cinq frères, Louis et Jean, communistes avant la guerre, entrent dans l’action clandestine (Résistance en Alsace et en Moselle annexées|groupe Lorraine) dès le début de l’occupation[18] et dont deux femmes, Aimée, décorée de la Légion d’honneur, et Olga, sa belle-sœur, seront déportées à Auschwitz[19].

Le pseudonyme Rivière

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Louis Godefroy, Rivière en Résistance, ne doit pas être confondu avec Rivier, qui est le pseudonyme porté par Maurice Rousselier, colonel FFI qui est, en 1944, en qualité de commandant de la Région R 5 (Limoges), le supérieur hiérarchique de Rivière.

Il ne doit pas non plus être confondu avec Rivière, autre résistant, plus communément connu sous son nom de guerre Marquis, dirigeant de la "Section atterrissage parachutage" (S.A.P.). Paul Rivière est, comme Louis Godefroy, Compagnon de la Libération.

Le résistant Rivière ne doit pas, non plus, être confondu avec l’auteur d’un des premiers actes de résistance en Charente, Jean-Jacques Rivière, un jeune résistant, qui, avec Gontran Labrégère[20], incendie un dépôt de paille en gare d'Angoulême la nuit du [21].

Décorations

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  1. Rivière apprécie peu le site de Châlus, un éperon rocheux, qui ne présente guère de possibilité de fuite en cas d’encerclement. Ainsi, selon Michel Bloch, dans l’article qui relate ses souvenirs de la période de la guerre 1939-1945, au chapitre Juin 1944 - août 1944 - Avec les FTP, Rivière ne cessait de protester parce qu’on l’avait installé dans ce château; il disait « c’est la bonne chose à faire pour se faire pincer, une ferme isolée me conviendrait bien mieux ».
  2. Le 126e régiment d’infanterie renaitra en 1947 en Algérie, devenant un centre d'instruction pour ce nouveau théâtre d'opération.

Références

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  1. « Louis Godefroy », sur le site des Français Libres, (consulté le )
  2. « les mémoires de G. Pirot », sur le site ‘’Le Berry dans les années noires 1939-1945’’, (consulté le )
  3. « La Résistance en Lozère, essai sur la structure de l'interrégion FTP Normandie-Bretagne », sur le site du Lycée Chaptal - Mende, (consulté le )
  4. « Histoire et synthèse 1939-1945 », sur le site de la ville de Portes-les-Valence, (consulté le )
  5. https://castellan-valery.pagesperso-orange.fr/E_valery_resistanceBR_pr.pdf
  6. https://web.archive.org/web/20211228212212/https://castellan-valery.pagesperso-orange.fr/E_valery_resistanceBR_pr.pdf
  7. a b c et d Alain Albinet et Benoît Hopquin, Le secret de Meymac, un village à la recherche des corps de soldats allemands exécutés en 1944, Le Monde, 6 août 2023.
  8. « Roger Lecherbonnier, la vie d'un homme engagé », sur le site de l’AD PEP 91, (consulté le )
  9. « le 126e régiment d'infanterie de Brive, dont Godefroy fut le Chef de corps », sur le site de l’Armée de Terre, (consulté le )
  10. « Sans-culottes 1944 : les volontaires du Limousin », sur le site du Club Mémoires 52, (consulté le )
  11. Ph. LASCAUX témoin
  12. « la tombe de Louis Godefroy au cimetière de Saint-Jean de Fos », sur le site Cimetières de France et d’ailleurs, (consulté le )
  13. PLAQUE EN HOMMAGE À LOUIS GODEFROY, DU GROUPE PIAT, Musée de la Résistance en ligne
  14. « Godefroy », sur le site Signification prénom.com, (consulté le )
  15. « Les Français Libres, de juin 1940 à juillet 1943 », sur le site Français Libres, (consulté le )
  16. « Neuvic libérée voici 67 ans », sur le site de la mairie de Neuvic sur l’Isle, (consulté le )
  17. « La Dordogne libérée du 19 au 22 août 1944 », sur le site de l’Association nationale des anciens combattants de la Résistance ( A.N.A.C.R.), (consulté le )
  18. « Aimée DORIDAT, née Godefroy - 31767 », sur le site de l’association Mémoire vive des convois des convois des 45000 et 31000 d’Auschwitz-Birkenau, (consulté le )
  19. « Olga Godefroy », sur le site de l’association Mémoire vive des convois des convois des 45000 et 31000 d’Auschwitz-Birkenau, (consulté le )
  20. « La Résistance civile et militaire en Charente », sur le site du mémorial de la Résistance de Chasseneuil sur Bonnieure, (consulté le )
  21. « Gontran Labrégère », sur le site du Musée de la Résistance et de la Déportation d’Angoulême, (consulté le )
  22. « Louis GODEFROY », sur Musée de l'Ordre de la Libération (consulté le )
  23. « - Mémoire des hommes », sur www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr (consulté le )