Riagat de Treffiagat
Riagat est un saint breton, patron de la commune de Treffiagat-Léchiagat. L'église paroissiale de Treffiagat s'appelle Saint-Riagat : on y voit une statue moderne du saint en évêque. Sa fête est fixée le , et un pardon en son honneur a lieu chaque année à Treffiagat le .
Le toponyme « Treffiagat » vient de « Tref Riagat », nom attesté en 1351[1] : « la trève de Riagat ». Le nom du port de Léchiagat contient aussi le nom du saint, bien que la composition soit plus incertaine : *Les-Riagat ou *Les-to-Riagat (avec le mot breton les, « habitation enclose », « cour »)[2]. On notera aussi la plage de Pors Riagat, sur la commune voisine de Plobannalec-Lesconil, et le manoir de Lestrediagat en Treffiagat. En dehors du Pays Bigouden, on trouve un lieu-dit Larriegat (c'est-à-dire *Lan Riagat) à Lopérec.
Saint Riagat n'est connu qu'en Bretagne. Son nom apparaît sous la forme du vocatif latin, « Riacate », dans une litanie publiée par Jean Mabillon, extraite d'un manuscrit de l'abbaye Saint-Remi de Reims qu'il datait du VIIIe siècle[3].
Dans l'hagiographie traditionnelle, Riagat est présenté comme un abbé irlandais du Ve siècle qui se réfugia en Armorique avec ses moines[4]. Mais Léon Fleuriot[5] et d'autres spécialistes modernes identifient Riagat avec Riochatus, un religieux breton présent en Gaule dans la seconde moitié du Ve siècle et mentionné par Sidoine Apollinaire dans une de ses lettres[6].
Dans cette lettre, datée par divers spécialistes d'entre 471 et 476 (fin 471 selon André Loyen), Sidoine, s'adressant à son ami l'évêque d'origine bretonne Fauste de Riez, lui raconte qu'il a pu prendre connaissance de ses livres grâce au séjour que Riochatus a fait à Clermont : « J'ai lu tes volumes que Riochatus, prêtre et moine, et par là deux fois étranger à ce monde, rapporte pour toi à tes Bretons »[7]. L'Historia Brittonum affirme que Fauste de Riez était un fils incestueux de Vortigern[8], et d'autre part, dans une généalogie des rois de Buellt descendants de Vortigern, mentionne sans doute un Riacat, fils de Pascent fils de Vortigern[9]. Cependant, ce Riacat, qui serait donc un neveu de Fauste de Riez, paraît ici avoir eu une descendance royale, ce qui ne colle guère avec Riochatus « prêtre et moine »[10].
Étymologiquement, on explique en général le nom Riochatus par les éléments rigo-, « royal », et catu-, « combat ». Cependant, le premier élément pourrait être plutôt *riyo-, « libre » (gallois rhydd)[11].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Cartulaire de Quimper, Ms. BnF latin 9 860, fol. 50.
- William B. S. Smith, « De la toponymie bretonne », Language, vol. 16, n° 2, 1940, p. 112.
- Jean Mabillon, Veterum Analectorum collectio, t. II, Paris, 1675, p. 669-680 (sous le titre Veteres litaniæ anglicanæ a mille annis editæ, bien que, selon Léon Fleuriot, ce soient des litanies typiquement bretonnes). Document également cité comme exemple dans le De re diplomatica.
- Malo-Joseph de Garaby, Vie des bienheureux et des saints de Bretagne, pour tous les jours de l'année, Saint-Brieuc, 1839, p. 467-468. Cependant, nombre de ceux qui reprennent cette tradition ajoutent juste après que son nom est typiquement breton.
- Léon Fleuriot, Les origines de la Bretagne, Bibliothèque historique Payot, Paris, 1980, p. 140-142.
- Livre IX, lettre 9 dans l'édition d'André Loyen (Sidoine Apollinaire, Tome III : Correspondance. Livres VI-IX, Paris, Les Belles Lettres, 1970, p. 205).
- « Legi volumina tua quæ Riochatus antistes et monachus, atque istius mundi bis peregrinus, Britannis tuis pro te reportat ».
- Historia Brittonum, § 48 : « Quartus [sc. filius Guortigirn] fuit Faustus, qui a filia sua genitus est illi, et sanctus Germanus baptizavit illum et nutrivit et docuit [...] ; et unam filiam habuit, quæ fuit mater Fausti sancti ».
- § 49 : « Teudubir ipse est rex Buelitiæ regionis, filius Pascent, filii Guoidcant, filii Moriud, filii Eldat, filii Eldoc, filii Paul, filii Mepurit, filii Briacat, filii Pascent, filii Guortigirn Guortheneu [...] ». La forme Briacat pourrait être une contamination du latin « filius Riacat » et du vieux breton « mab Riacat », de même sens.
- Nora Kershaw Chadwick, Studies in the Early British Church, Cambridge University Press, 1958, p. 254-263.
- Xavier Delamarre, Dictionnaire de la langue gauloise, Éditions Errance, Paris, 2001, p. 218. On retrouve en Gaule des anthroponymes commençant par Rio-, et non Rigo- : Riomarus, Riomonus, Riotalus, Riovercus...